Que s’est il passé avant l’exécution d’innocents par l’Armée allemande à Kragouillévatz dans la forêt de Choumaritsé le 21 octobre 1941? Combien de civils ont été fusillés et quel a été le rôle des Tchetniks, des communistes et des miliciens de Liotic?
Par Miloslav SAMARDJIC
(Traduit du serbe)
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Début octobre 1941, les communistes se préparaient à attaquer Kragouillévatz sous occupation allemande. Le lieutenant Dragan Sotirovic, chef d’état major des unités Tchetniks de Ravna Gora, reçut l’ordre du Commandement Suprême «d’empêcher par tous les moyens l’attaque sur Kragouillévatz». Il a donc envoyé un message aux meneurs des paramilitaires communistes dans lequel il essaya de leur faire comprendre qu’à ce moment là «il est matériellement impossible de conquérir Kragouillévatz, mais une attaque aura certainement des conséquences dramatiques sur la population de la ville.», c’est pourquoi ils ne devaient pas s’étonner si à l’entrée de la ville «moi et mes unités vous barrerons la route». Le plan conçu par Sotirovic pour empêcher l’offensive des communistes a été présenté le 11 octobre au lieutenant Zoran Voutchkovic commandant l’unité tchetnik de Takovo, et il lui a déclaré à cette occasion que «sans nous, les communistes ne peuvent pas prendre Kragouillévatz mais ils lanceront leur offensive quand même».
Expéditions punitives allemandes: de Kragouillévatz à Gorni Milanovatz et retour
L’attaque de Kragouillévatz par les communistes est de toute façon très vite passée au second plan quand les Allemands ont pris la route de Gorni Milanovatz et du mont Roudnik le 3 octobre. Ils avaient pour objectif de libérer les membres de leur garnison qui y avaient été capturés par les Tchetniks. Le 3ème bataillon du 740ème régiment d’infanterie de la 717ème division ainsi que deux chars d’assaut sont partis de Kragouillévatz, tandis qu’un bataillon de la 714ème garnison partait en même temps de Topola.
Apprenant les mouvements de troupes nazies, les Tchetniks entreprennent de détruire les ponts près des villages proches de Gorni Milanovatz.
Le plan était que les Allemands soient attaqués de front par le régiment tchetnik de Takovo, et en même temps de dos par les unités communistes venant de Tchatchak. Dans les faits, les communistes n’ont pas fait parlé d’eux lors de cette opération pendant que les Tchetniks étaient déployés devant Gorni Milanovatz. L’offensive allemande était appuyée par des Stuka et les Allemands ont fini par entrer dans Gorni Milanovatz vers 17h. Ils ont pillé la ville puis l’ont rasé, ils ont pris environ 170 hommes en otage et ils ont poursuivi leur route vers le mont Roudnik. Voyant arriver les colonnes de la Wehrmacht depuis Gorni Milanovatz, les Tchetniks ont été obligés de se retirer du Roudnik, que les nazis ont aussi pillé puis rasé. Le bilan des opérations a été de 17 morts côté Tchetniks et quatre Allemands tués et huit blessés.
La route Gorni Milanovatz – Roudnik était goudronnée, ce qui n’était pas le terrain de prédilection des blindés. Un petit pont en bois entre deux villages sur la route n’a pas supporté le poids des chars allemands et il s’est effondré, rendant inutilisables deux blindés lourds qui ont plongé dans le ravin. Quelques jours plus tard, les Tchetniks les ont réparé et ils s’en sont servi dans la bataille pour la libération de Kraliévo.
À la suite de ces événements, les communistes voulaient toujours attaquer Kragouillévatz. La situation y était plus difficile que peu avant autour de la ville de Yagodina où le lieutenant Sotirovic avait réglé le problème simplement en menaçant les communistes. Ceux ci avaient des forces plus importantes dans le centre de la région de la Choumadia, essentiellement le groupe des partisans de Kragouillévatz (d’après leurs sources ils étaient 700 à cette époque, mais d’autres sources ne font état que de 250 hommes en arme).
Le 10 octobre, une trentaine de communistes tuent des soldats Allemands d’une section de transmission ; trois jours plus tard les Tchetniks apprennent que les Allemands organisent des rafles de civils à Kragouillévatz pour les fusiller en représailles.
Ce jour-là, le 13 octobre, le major Miodrag Palochevic, commandant l’unité Tchetnik de Choumadia, a envoyé un ultimatum au major allemand Köenig commandant la place, par lequel : si les civils de Kragouillévatz venaient à être fusillés, les Tchetniks fusilleraient à leur tour les soldats allemands capturés à Gorni Milanovatz. Au cours de la journée, le major Palochévic s’est rendu chez les communistes pour négocier. Il a réussi à faire reporter l’attaque sur Kragouillévatz mais a dû concéder en échange d’attaquer avec eux la colonne allemande qu’ils prévoyaient devoir revenir à Gorni Milanovatz. Cet accord a reçu l’aval de l’état major de Ravna Gora que le sous-lieutenant Pavlovic en l’absence du Général Draja Mihaïlovic a commenté comme suit: «si la population est condamnée à périr, qu’elle vous voit à ses côtés».
Comme prévu, le 3ème bataillon allemand du 749ème régiment d’infanterie, aidé des chars et de l’artillerie est parti de Kragouillévatz à l’aube du 14 octobre précédé par un bouclier humain constitué d’habitants de la ville. Selon l’accord entre le Major Palochévic et les communistes, ceux-ci devaient empêcher les allemands de sortir de la ville, mais dans les faits ils avaient disparus. C’est ainsi que les Allemands sont tombés nez à nez avec la partie avancée de l’unité Tchetnik de la région de Grouja du capitaine Douchane Smilianic près du village de Dratcha. À cette occasion, son chef d’état-major, le lieutenant Blagoïé Stojantchévic ‘Bagué’, a été tué. Lorsque le premier char d’assaut est passé sur la tranchée qu’il avait creusée, il a sauté avec une grenade sur le deuxième char mais une rafale de mitrailleuse l’a fauchée dans son élan. Il a été enterré dans le jardin du Monastère de Dratcha où se trouve encore aujourd’hui sa tombe (sur sa pierre tombale a été inscrit par erreur le nom de «Blagoïé Stokic»).
Le major Palochévic donna l’ordre de n’ouvrir le feu qu’à son signal. Le groupe de civil formant le bouclier humain devant la colonne de soldats Allemands arriva à une trentaine de mètres des tranchées où étaient cachés les Tchetniks. Soudain, à leur signal, les civils se ruèrent dans ces tranchées, permettant aux Tchetniks d’ouvrir le feu de tous les cotés sur les Allemands distants d’environ deux cent mètres. De tous les côtés étaient postés les Tchetniks, sauf du coté droit où se trouvaient jusqu’au début de la bataille les communistes. Dès le signal donné par le Major Palochevic, les Tchetniks ont ouvert le feu sur les allemands et les communistes se sont retirés de leurs positions, laissant les Tchetniks sans soutien. Les Allemands ont profité de l’occasion inespérée par eux pour prendre possession de ce flanc droit et mettre en place des tireurs d’élite, mettant ainsi à mal les positions Tchetniks. Une seule unité des forces communistes a pris part à la bataille, celle commandée par Aleksandar Beliakovic, qui peu après, avec son unité, intégrera les rangs Tchetniks (il sera plus tard capturé avec ses hommes par les Allemands et exécuté en 1943). Pressentant la trahison des communistes, le capitaine Smilianic se pressa de faire demi-tour pour lancer une offensive sur l’artillerie allemande restée sans protection à l’arrière garde de la colonne. Une bonne partie des batteries de cannons a été détruite par son unité ce qui permit au major Palochévic et à ses troupes de maintenir le reste des Allemands entre deux villages.
Durant la nuit, le major Palochévic a donné l’ordre à ses troupes de consolider leurs positions sur le mont Rapaï et ses alentours. A l’aube du 15 octobre, les Tchetniks lancèrent une offensive sur les troupes allemandes cantonnées entre deux villages. Le lieutenant Misha Moïsilovic de Kragouillévatz a une dernière fois inspecté les endroits de la chaussée où des bombes avaient été enterrées. C’était la fois de trop : une rafale de mitrailleuse lourde d’un char allemand l’a fauché en plein élan. La manœuvre a quand même réussi puisque deux chars allemands ont sauté sur ces pièges et ont eu leurs chenilles détruites. Le caporal Radé Jivanovic qui a déclenché l’explosion caché dans un buisson à proximité n’a pas survécu à l’explosion. Un oukase du Roi Pierre II du 6 septembre 1942 le décorera à titre posthume de l’étoile de Karageorges, IVe rang.
L’unité Tchetnik de Takovo a alors pris d’assaut la colonne allemande et a littéralement écrasé leur flanc droit. Le sergent Yérémic a sauté dans un des chars ennemis abandonné, ignorant que les nazis l’avaient aspergé d’ypérite avant de l’abandonner. Il est mort dans d’atroces souffrances au bout d’une heure d’une insupportable agonie.
Toutefois, les nazis réussirent à forcer le passage vers Gorni Milanovatz où ils ont de nouveau incendié la ville et capturé 133 civils qui n’avaient pas réussi à s’enfuir pour en faire un bouclier humain puis ils sont revenus sur leurs pas. Pour affronter cette nouvelle prise d’otages, les Tchetniks se sont séparés : une partie a pris le chemin de la Ravna Gora pour devancer les Allemands pour le cas où ils décidaient de prendre cette direction, l’autre a continué à harceler la colonne allemande sur ces deux flancs. A deux kilomètres de Gorni Milanovatz, deux chars allemands se sont embourbés sur le chemin de terre, et leur équipage s’est enfuit devant les incessantes attaques Tchetniks. En somme, les Tchetniks ont pris possession des chars qu’ils prévoyaient utiliser lorsqu’ils attaqueraient la ville de Kraliévo pour la libérer.
Ainsi les Allemands avaient perdu 4 chars au total (deux capturés et deux détruits) ce qui était, jusque là, la plus grosse perte en matériel lourd en une seule bataille dans la région.
Les différentes versions des évènements d'après les communistes
Concernant sa rencontre avec Vladimir Dedijer - le commissaire politique de l’unité paramilitaire communiste de Kragouillévatz - le lieutenant Zvonimir Voutchkovic écrira quelques années après la guerre dans ses mémoires:
«Le journaliste Vladimir Dedijer, homme habile de sa plume a décrit en des milliers de pages les batailles des communistes lors de la dernière guerre. Dans le chapitre «En Choumadia» de son journal de guerre, ni la trahison dont ils ont fait preuve devant Kragouillévatz, ni la mort du sous lieutenant Moïsilovic n’ont été mentionnés. Pourtant à Kragouillévatz vivent sûrement encore beaucoup de témoins ayant vécu ces évènements».
En fait, l’Histoire écrite par les communistes décrit ces évènements à l’opposé de la réalité : ils ont soi-disant capturé les chars allemands, les Tchetniks n’ont soi-disant pas combattu les nazis, etc., etc.… En voici un extrait:
«Une partie des unités de Tchatchak et de Kragouillévatz ont fait prisonniers le 4 octobre près de 44 sous-officiers et soldats allemands. En conséquence, le commandement allemand a envoyé ces troupes stationnées à Kragouillévatz dans une expédition punitive en direction de Gorni Milanovatz, mais nos unités de partisans leurs ont opposé une forte résistance du 14 au 16 octobre. Les nazis ont quand même réussi à percer sur Gorni Milanovatz le 16 octobre, l’ont mis à sac et brûlé parce qu’ils n’étaient pas en mesure d’y installer leurs positions, puis ils sont retournés à Kragouillévatz, brûlant les villages qui se trouvaient sur leur chemin. Ils avaient raflé environ 200 citoyens et paysans dont ils ont fait leurs boucliers humains pour se protéger des possibles attaques des partisans. Malgré cela, les partisans ont attaqué les allemands près du village de Nèvadé, leurs ont fait subir de lourdes pertes, et ont capturé deux chars d’assaut.»
Ils n’ont pas manqué de parler, afin de rendre leur version plus cohérente, des 40 soldats et 4 sous officiers allemands qu’au cours de ces évènements… les Tchetniks du sergent Slavko Tsvetic avaient capturé, non pas «dans les environs de» comme ils l’affirmaient, mais dans le village de Stragari à 25 kilomètres de là, dans la nuit du 3 au 4 octobre, où ces Allemands étaient chargés de garder un dépôt de munitions. Les prisonniers allemands avaient été amenés sur la Ravna Gora, à la suite de quoi le Commandant suprême des troupes d’occupation allemandes en Serbie, le général Böehme, a interdit à ses officiers «le moindre pourparler avec les insurgés» ajoutant qu’«en de multiples occasions, l’armée du Reich a été roulée dans la farine après avoir accepté la promesse qu’on leur a faite qu’ils pourraient repartir saufs, au lieu de se défendre jusqu’à la dernière balle», d’après l’ordre écrit à ses troupes.
Il existe encore une autre version communiste des événements sur la route Kragouillévatz – Gorni Milanovatz:
«Une partie des partisans communistes de Kragouillévatz ont attaqué les troupes allemandes dans la nuit du 17 au 18 octobre 1941 entre les villages de Doumatche et Liliaka et ont fait subir d’importantes pertes au 3ème bataillon du 749ème régiment d’infanterie. »
Ainsi, dans cette version, la bataille n’a pas eu lieu à Nèvadé mais 20 km plus loin. Par contre, le 17 octobre, les Allemands étaient déjà de retour à Kragouillévatz.
Une troisième version communiste du déroulement des événements nous est donnée par Vladimir Dedijer:
«En octobre 1941 j’étais le commissaire politique du détachement de Kragouillévatz. Une unité allemande a tenté de rentrer de force dans Kragouillévatz en provenance de Gorni Milanovatz. Le deuxième bataillon de notre détachement a attendu en embuscade les Allemands le 18 octobre – ceux du 3ème bataillon du 749ème régiment - et nos forces se sont jetées dans la bataille. En représailles des dix tués et vingt blessés que les Allemands ont eu pendant cette bataille contre nos unités de Kragouillévatz et de Tchatchak, les Allemands ont massacré des citoyens de Kragouillévatz.»
Le commissaire politique Dedijer a été très imaginatif dans la description de ces évènements. Dans l’une d’elles il explique que les pertes humaines des troupes allemandes ont été causées à leur retour de Gorni Milanovatz vers Kragouillévatz, se trompant même de date (18 octobre alors que cela s’est produit le 14 octobre). Mais il n’y a pas le moindre indice permettant d’affirmer que de lourds accrochages avaient lieu à cette occasion. En réalité, les accrochages les plus sanglants avaient lieu lorsque les troupes allemandes sont allées de Kragouillévatz vers Gorni Milanovatz.
D’ailleurs, dans les années 1970, à l’entrée de Gorni Milanovatz, un monument a été inauguré donnant encore une nouvelle version des évènements. Ce monument était un char, censé être allemand, restauré pour pouvoir accréditer cette fois la thèse des communistes selon laquelle ils avaient attaqué la colonne allemande, mais cette fois-ci… avec des chars! Cette nouvelle version de l’Histoire par les communistes est décrite sur une plaque apposée au socle du monument: «Les 6 et 15 octobre 1941, les combattants du bataillon communistes de Takovo ‘Dragisha Mishovic’ ont capturé deux chars allemands. C’étaient les deux premiers chars ennemis capturés par la Révolution prolétarienne. Ils ont été utilisés lors de la bataille pour la libération de Kraliévo en 1941».
Les curieux pourront constater que les indications décrivant les leviers de commande sont lisibles encore de nos jours et qu’ils sont écrits en … anglais ! En fait, il s’agit d’un des nombreux tanks américains dont les Etats Unis ont fait cadeau, sous forme d’aide militaire (dans le cadre du Plan Marshall), aux communistes yougoslaves après la guerre.
Mais à quelques kilomètres de là, en direction de Kragouillévatz, les communistes ont érigé un autre monument décrivant une autre version, encore différente (la cinquième), des évènements. Cette zone, celle du mont Rapaï, était selon eux, le lieu de la bataille la plus intense que l’unité paramilitaire communiste avait mené en 1941 pour défendre la zone libre de la République Communiste d’Oujitsè des offensives menées par les Allemands bien plus puissants. Offensives que les allemands menaient incessamment depuis Kragouillévatz. Cependant, au lieu de préciser des dates et des chiffres, les communistes ne parlaient que de combats «incessants» et de pertes «lourdes» allemandes.
Dix huit kilomètres plus loin, entre deux villages, sur un autre monument érigé pour commémorer toujours les mêmes évènements, ils décrivent une version encore différente des précédentes. Voici ce qui est écrit sur la plaque commémorative du monument, érigé à l’endroit même d’où les communistes se sont retirés le 14 octobre 1941, laissant les Tchetniks du major Palochévic seuls contre une division nazie: «En défendant la zone libre de la République Communiste d’Oujitsè, les combattants du bataillon communistes de Tchatchak ‘Dragisha Mishovic’ ont occasionné d’énormes pertes à l’occupant et ont capturé deux chars d’assaut ennemis».
En conclusion, les communistes ne s’étaient pas accordés sur leurs versions des évènements, des dates et des lieux d’une seule et même bataille sur la route Kragouillévatz - Gorni Milanovatz.
En effet: une fois ils prétendent attaquer les allemands à leur sortie de Kragouillévatz, une autre fois à leur retour à Kragouillévatz ; une fois ils prétendent que la bataille a eu lieu le 6 et le 15 octobre, une autre fois du 14 au 17 octobre ; une fois cela ce serait passé tout près de Kragouillévatz, une autre fois à vingt kilomètres de là, etc., etc.…
Cela va jusqu’au point qu’un des chefs d’escouade communistes de Kragouillévatz, Teodosiyé Parezanovic reconnaît presque ouvertement que les communistes n’avaient pas participé à cette bataille.
Voilà comment il décrit les évènements du 14 et 15 octobre 1941: «À la nuit tombante nous sommes arrivés sur les hauteurs surplombant le village de Liouliatsi. Nous avions un paysage atroce sous nos yeux: des villages brûlaient en Choumadia… Le lendemain à l’aube, nous sommes partis en chasse des Allemands. Nous passions par les vergers et les forêts, le plus loin possible de la chaussée, pour ne pas être vus des nazis».
Mais dans aucune des versions, les communistes n’apportent la moindre preuve de leur participation à ces batailles. Aucun de leurs combattants de la première heure ne décrit le déroulement des batailles contre les nazis, à la différence des lieutenants Tchetniks Dragan Sotirovic et Zvonko Voutchkovic.1
Comme dans le cas de Kraliévo, lors de l’apport d’éléments de preuve, les communistes ont eu à faire face au problème des victimes. En effet, là non plus aucun paramilitaire communiste n’a été tué tandis que les Tchetniks avaient perdu 2 officiers et un grand nombre de sous officiers et de soldats. D’après les communistes, ils auraient capturé deux chars, tué 10 et blessé 26 soldats allemands sans avoir eu la moindre perte dans leurs rangs. Toutefois, effectivement vers le 15 octobre, à côté de la route de Gorni Milanovatz, deux partisans communistes ont trouvé la mort. Voici la description par le chef d’escouade Parezanovic des circonstances de la mort de l’un d’eux, Vlade Raïtchevic ‘Outcha’:
«Au retour d’une mission d’éclaireur, le camarade Outcha, ignorant que les Allemands passaient la nuit au village de Vratièvchnica, est tombé, avec un autre camarade, nez à nez avec les troupes allemandes en pleine nuit, et après une courte lutte il est mort en héros…Il n’a pas réussit à rencontrer notre unité, ni même à faire sa connaissance. Il est mort précisément sur le chemin menant à elle.»
Bilan macabre et falsification communiste de l’Histoire
En représailles des pertes que les Tchetniks leur avaient fait subir les 14 et 15 octobre, les Allemands ont fusillé un grand nombre de civils de la région. D’après les données dont dispose le musée ‘21 octobre’ à Kragouillévatz, fondé pour l’étude de ce massacre de la population, le nombre des victimes civils fusillées est le suivant:
Donc, d’après les données dont dispose le musée ‘21 octobre’, les 19, 20 et 21 octobre 1941, 2.803 personnes ont été fusillées à Kragouillévatz et dans trois villages environnants. Pour chacune de ces victimes, le musée dispose de son état civil. Il est toutefois possible que des informations aient échappé à la vigilance des chercheurs, mais les risques d’erreur sont faibles.
A contrario, le régime communiste a créée de toute pièce le chiffre mythique de 7.000 victimes de la terreur nazie à Kragouillévatz en octobre 1941.
Voici une de leur source: «D’après les informations collectées à Kragouillévatz après guerre, on estime que ce jour du 21 octobre, environ 7.000 personnes ont été fusillées. Pour le supplice dans la forêt de Choumaritsé, les nazis avaient mis en rang des classes entières du lycée de Kragouillévatz qu’ils ont fusillé avec leurs professeurs.»
Comme nous l’avons vu, il n’y avait pas d’informations sur 7.000 victimes mais «seulement» 2,803 victimes pendant les trois jours de terreur nazie à Kragouillévatz. D’après des sources non officielles, 7.000 est le nombre de victimes durant toute la Seconde Guerre Mondiale à Kragouillévatz, y compris les victimes des pelotons d’exécution mis en place par les communistes à partir d’octobre 1944 ; soit au moins autant de civils que les nazis trois ans plus tôt.
Pour construire leur mythe de 7.000 victimes du nazisme des 3 jours de terreur à Kragouillévatz en octobre 1941 et le rendre crédible, les communistes ont au passage rasé après la guerre tout les crucifix surplombant les tombes des victimes pour les remplacer par des étoiles rouges. Ils ont interdit les processions religieuses en hommage aux victimes, alors que les nazis, même si ils les interdisaient formellement, ils les toléraient.
De cette tragédie ressort le destin particulièrement tragique de Sibinka Milioïchic dont la maison se trouvait précisément dans la forêt de Choumaritsé. Pendant la rafle des otages, les nazis avaient assassiné son fils Dragomir et son mari Petar. Elle les avait enterré tout près de la maison familiale (car les nazis imposaient que les victimes soient enterrées sur le lieu de leur décès) et a planté des croix. Les communistes après la guerre, ont remplacé de force la croix par une stèle de béton surmontée d’une étoile rouge. Sibinka a quand même remis une croix, et les communistes l’ont rasé pour la remplacer par une étoile rouge.
Ainsi, sa vie entière, la veuve a lutté contre la dictature de l’étoile, remplaçant celle que les communistes construisaient par une croix selon le rite Orthodoxe en Serbie. Quand elle est décédée, l’étoile avait définitivement vaincu la croix.
En réalité, ce n’étaient pas les seules tombes que les communistes avaient profané dans la forêt de Choumaritsé. Dans cette forêt se trouvait le cimetière militaire principal datant de 1914 et 1915. Sur une photo restaurée du cimetière, le plus grand chiffre inscrit sur une croix est le 1.344, mais on suppose qu’il devait y avoir environ 2.500 tombes. Les communistes ont rasé le cimetière pour y replanter une forêt dense.2 Il ne reste aujourd’hui que quelques dizaines de stèles symbolisées par une croix en bois datant de cette époque. Ces croix en bois devaient être remplacées, à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, par des croix en pierre comme ça a été le cas au cimetière militaire de Zeitenlik.
Ainsi, après la Seconde Guerre Mondiale, les communistes ont profané plus de 5.000 tombes à Kragouillévatz. Comme la plupart de leurs victimes n’ont pas de tombes, cela porte à plus de 8.000 le nombre de victimes sans sépulture.
La proclamation nazie du 22 octobre 1941 fait état de 2.300 exécutions sommaires en représailles aux 10 allemands tués et 26 blessés. La spécificité des représailles en Serbie est que: 100 Serbes étaient fusillés pour 1 soldat allemand tué, et 50 Serbes étaient exécutés pour chaque soldat allemand blessé. Mais, les nazis n’ont pas fait de proclamation officielle pour les exécutions de civils des 19 et 20 octobre. Dans les faits, à Kragouillévatz, les nazis dépassaient leur «quota de cent pour un» alors que dans d’autres villes, ils exécutaient moins de civils. La raison pour laquelle Kragouillévatz a été une exception dans la cruauté allemande est donnée par le rapport du Kreiskomandant Bishofshausen:
«Aucun occupant ne tolère de rébellion, et la Serbie a commencé à se soulever. L’occupant doit donc la calmer. Il devait le faire ici à Kragouillévatz parce que de la façon dont respire Kragouillévatz respire toute la Choumadia. Et de la façon dont respire la Choumadia respire toute la Serbie.»
Les évènements vus par les collabos des nazis
Quant aux partisans de Dimitri Liotic ils sont d’un tout autre avis sur l’origine de la répression nazie. D’après eux les Allemands tués du 14 au 16 octobre 1941 l’avaient été par les communistes, et ils avaient ensuite mutilé leurs cadavres, en leur arrachant les yeux, en coupant les parties génitales, etc…
Quels sont les arguments pour une telle affirmation? Borivoïé Karapandjic, le chef de file des historiens pro-Liotic, a écrit que cela lui a été rapporté par le colonel Pantic, membre de la délégation du Général Draja Mihaïlovic dans les pourparlers avec les Allemands au village de Divci, le 11 novembre 1941. Les Allemands auraient montré au Général Draja des photos des cadavres mutilés de leurs soldats lui disant: «De sources sûres nous savons que vos hommes ont aussi participé à cette bataille commandés par le major Palochevic». La bataille aurait eu lieu, d’après ce qu’auraient dit les Allemands «le 8 octobre au village de Liouliatsi».
En plus de l’erreur sur la date, Karapandjic est démenti par d’autres faits. Tout d’abord, dans le rapport écrit par les Allemands durant les pourparlers de Divci, il n’y a nulle trace de ce que le colonel Pantic aurait prétendument révélé à Borivoïé Karapandjic. Ensuite, comme nous l’avons vu, les communistes n’ont pas participé aux batailles du 14 au 16 octobre sur la route de Kragouillévatz à Gorni Milanovatz. En outre, personne ne pouvait approcher les cadavres allemands. Les nazis ramassaient leurs tués et les chargeaient immédiatement dans leurs camions. Enfin, aucun des Tchetniks ayant participé aux batailles ainsi que ceux qui étaient présents aux pourparlers au village de Divci ne mentionne le cas de cadavres de soldats allemands.
Les partisans de Liotic avaient donc besoin de cet événement pour détourner l’attention de leur propre rôle dans ces représailles allemandes sur la population à Choumaritsé le 21 octobre 1941. Tout Kragouillévatz les a vu en train de rassembler les citoyens afin de participer à la sélection de ceux qu’ils allaient fusiller en représailles. Les partisans de Liotic affirment qu’à ces moments-là ils en avaient sauvé beaucoup du peloton d’exécution, ils ont même publié des témoignages de ceux qui avaient eu la vie sauve. Il y a un peu de vrai dans cela : les miliciens de Liotic ont effectivement fait épargner à des habitants les balles des mitrailleuses allemandes. D’après Marisav Petrovic, le commandant de l’unité des miliciens de Liotic dont il est question ici - le 5ème régiment de volontaires, de cette façon ont été préservées jusqu’à 1.300 personnes. Les communistes affirment que le commandant Petrovic avait épargné «ceux qui avaient un laissez-passer de la Kreiskommandantur, les membres du parti de Liotic et ceux dont la profession était indispensable aux Allemands (médecins, pharmaciens, techniciens et artisans, etc…)».
Toutefois, d’après les élements conservés par le Musée ‘21 Octobre’, Marisav Petrovic avait surtout sauvé des écoliers, sinon ils auraient été encore plus nombreux parmi les victimes. Mais le choix des uns ou des autres dépendait parfois d’un détail aussi insignifiant que la longueur de cheveux de la personne! Voici comment Marisav Petrovic décrit cela dans ces mémoires:
«Dans la troisième centaine d’otages, au moment où nous mettions de côté des lycéens en vue de les libérer, j’ai attrapé un élève grand et très costaud par les épaules qui devait sûrement être en Terminale et au moment où je voulais le remettre à nos volontaires pour l’épargner, l’interprète slovène des allemands m’attrapa par le bras et me dit : ‘Je ne peux pas vous permettre d’épargner cet élève et de le libérer’! Interloqué et à ma question ‘Pourquoi je vous prie ?', l’interprète Slovène me demanda si je ne voyais pas qu’il avait les cheveux longs – comme il disait – ‘d’une coiffure de communiste’ et qu’il appartenait vraisemblablement aux Jeunesses communistes; et moi, pour éviter de perdre du temps je n’ai pas réagi à la réflexion de l’interprète slovène, me rappelant les réflexions de notre camarade Président (du parti politique pro-fasciste de Dimitri Liotic ‘Zbor’ - NdT) ‘Qui protège tout, perd tout’. Ainsi j’allai mettre de côté, pour les sauver, d’autres élèves plus jeunes.»
Ce que les partisans de Liotic omettent de préciser c’est qu’à la place des personnes qu’ils mettaient de côté étaient fusillés d’autres personnes; on ne peut donc, en fait, pas parler de sauvetage. Le terme «sauvetage» aurait été adéquat si le nombre d’otages prévus à fusiller avait été finalement réduit. En pratique, les Allemands avaient fusillé le nombre de Serbes qu’ils avaient prévu et même plus encore. La contribution des volontaires de Liotic à ce que la tragédie soit moindre en quelque sorte, est que après leur intervention moins d’écoliers ont été fusillés mais plus d’adultes.
Ainsi, la proclamation allemande affichée le 22 octobre sur les murs de Kragouillévatz porte le texte suivant:
«Les attaques lâches et sournoises de la semaine dernière ont assassiné 10 et blessé 26 soldats du Reich et doivent être sanctionnées. C’est pour cette raison que pour chaque soldat allemand tué 100 habitants ont été exécutés et pour chaque allemand blessé 50 habitants ont été exécutés, et ce, essentiellement des communistes, des bandits et leurs sympathisants ; au total 2.300 habitants. A l’avenir, il sera procédé avec la même fermeté pour chaque acte comparable, même si il ne s’agit que d’actes de sabotages.».
Dans leur propagande, les Allemands accusaient les communistes et souvent les Juifs pour les insurrections en Serbie. D’un côté, c’était parfaitement conforme avec leur idéologie nazie. D’un autre côté toutefois, ils estimaient que les Serbes préfèreraient que d’autres forces soient accusées pour le désordre que leur Armée Yougoslave. Ainsi est apparue une distinction entre les documents officiels et les documents internes à l’Armée hitlérienne. En interne, le nom de Draja Mihaïlovic et de ses «bandits» Tchetniks revenait souvent comme le plus dangereux des ennemis du Reich dans la région.
Pour ce qui concerne les miliciens de Liotic, ceux-ci écrivaient différemment pendant et après la guerre. Voici un extrait de leur journal ‘Notre Combat’ daté du 16 novembre 1941:
«Kragouillévatz et ces environs ont une autre allure par rapport à celle d’il y a trois semaines. Après tout ce qui s’est passé ces derniers jours, il en a résulté un changement de situation. Jamais il n’y avait eu une telle ruée pour s’engager dans la milice de Liotic que ces derniers jours. Même Belgrade a besoin d’un Strahinja Janjic. Celui-ci a un aide de camp prénommé Vassa qui donne 25 ou 50 coups de bâton en plein milieu du marché à chaque blaireau selon son mérite. Quand Belgrade aura institué ce système, alors tout le peuple Serbe sera guéri. »
(Extrait de l’ouvrage de Miloslav Samardjic «Le Général Draja Mihaïlovic et l’Histoire générale du mouvement Tchetnik» publié en langue serbe en 5 tomes)
Notes:
1 Il est intéressant de comparer les versions de la libération de Gorni Milanovats les 28/29 septembre 1941 du lieutenant Zvonko Voutchkovic dans son livre ‘Souvenir de la guerre’ avec la version communiste. Voutchkovic décrit par le menu et en détail comment en collaboration avec les communistes, son unité Tchetnik de Takovo avait fait prisonnier une unité allemande dans le bâtiment de l’école primaire. Après que les communistes s’étaient enfuis, il s’est rendu personnellement avec un drapeau blanc dans le bâtiment de l’école et a appelé les Allemands à la reddition. Soixante ans plus tard, en septembre 2001, sur ce même bâtiment, à côté de la même porte par laquelle Voutchkovic avait appelé le commandant allemand à se rendre, figure une plaque avec l’inscription suivante: «Les unités du bataillon de partisans de Takovo, faisant partie du régiment de partisans de Tchatchak ont capturé en septembre 1941 dans ce bâtiment, après un long combat, tous les membres de la garnison d’occupation allemande qui s’y trouvait. De cette façon a été libéré Gorni Milanovatz». Signé par ‘Bureau municipal de l’union des combattants’ (les communistes - NdT). Et de l’autre côté de la porte, le buste d’un quelconque ‘héros populaire’ communiste est toujours en place.
2 Quand en 1998, l’auteur de ces lignes avait découvert le cimetière détruit de Choumaritsé, il avait envoyé aux autorités municipales de la ville de Kragouillévatz le numéro du mois d’octobre du magazine Pogledi qui le rapportait, en demandant officiellement que le cimetière soit restauré à l’image du cimetière de Zeitenlik, puis que les croix soient de nouveaux mises sur les charniers de 1941 et que les victimes du communisme soient recensées. Le Conseil Municipal dans sa réponse a remercié pour l’initiative, en promettant que le Conseil allait «prendre toutes les mesures nécessaire à sa réalisation» (lettre du bureau exécutif de la ville de Kragouillévatz du 12 novembre 1998 num. II-01-060-604). Trois ans plus tard, rien n’avait changé. Fin 1998 toutefois, l’armée yougoslave et l’Institut pour l’entretien des monuments culturels de Kragouillévatz avaient restauré le cimetière militaire à Choumaritsé, mais seulement une petite partie, qui avait échappé aux destructions d’après la guerre. L’armée et l’Institut ont apposé une plaque indiquant que s’y trouvaient en tout 159 tombes. Mais pas un mot de la partie vingt fois plus grande du cimetière qui est maintenant recouvert de buissons qui s’étendent jusqu’à l’Hotel ‘Choumaritsé’.
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